Lors des Jeux Paralympiques de Londres l’annĂ©e dernière, Nathalie BenoĂ®t a remportĂ© une mĂ©daille d’argent en aviron. Le 15 juin, elle se lancera dans un autre grand dĂ©fi : rallier Paris et Marseille Ă la rame. Elle revient pour nous sur son expĂ©rience paralympique et nous explique son nouveau projet.
Nathalie, vous avez remporté une médaille d’argent en aviron lors des Jeux Paralympiques de Londres l’année dernière. Pouvez-vous nous raconter comment vous avez vécu cette finale de l’intérieur ?
Je l’ai étrangement bien vécue, alors que je suis d’habitude très stressée : pour tout vous dire, je pleure même en général avant les courses pendant les échauffements ! Pour les Jeux, j’avais décidé de faire une préparation mentale. Je l’ai faite toute seule, en prenant des conseils de spécialistes. J’ai fait beaucoup de visualisation pendant l’année olympique. Tous les soirs, je faisais entre six et dix fois la course dans ma tête, en temps réel. Et étrangement, j’étais assez sereine le jour J. Tout s’est déroulé comme je l’avais visualisé, même ma deuxième place. En effet, je ne m’imaginais pas gagner dans la visualisation car je savais très bien que la première place n’était pas accessible. Ça s’est donc fait très sereinement. On a été aussi porté par le public qui a aidé pendant la course.
Ces Jeux Paralympiques ont-ils répondu à vos attentes, que ce soit au niveau du résultat sportif ou de l’expérience humaine ?
Au niveau sportif, oui. Comme je viens de le dire, je ne pouvais pas viser plus haut que l’argent. J’étais donc comblée. Au niveau humain, je pense qu’on a eu de la chance que les Jeux soient à Londres car ils ont un petit train d’avance par rapport à nous au niveau du Paralympique. Ils ont une autre vision du handicap, un peu plus évoluée que la nôtre. Les Anglais connaissent mieux les disciplines paralympiques. Il y avait un monde fou, même sur l’aviron. J’ai été étonnée parce que c’était plein, bien qu’on fût excentrés par rapport aux autres et qu’il ne faisait pas très beau le jour J. On a été largement portés pendant les courses et même en ville. Ce qui était merveilleux, c’est qu’on était vraiment considérés comme des sportifs et pas du tout comme des handicapés. Ça a été très appréciable.
Qu’est-ce-que cette médaille d’argent a changé pour vous, que ce soit dans votre vie sportive ou personnelle ?
Ça a forcément été une grande satisfaction. J’en parle volontiers avec ma famille. Sinon, ça n’a pas changé grand-chose dans ma vie de tous les jours. On n’est pas comme les grands athlètes : on n’est pas reconnus dans la rue. Nous, on reprend notre vie tranquille et notre travail. Par contre, c’est sûr que ça m’a ouvert quelques portes. Par exemple, j’ai cette année le projet de faire Paris-Marseille à la rame. Avoir remporté cette médaille aux Jeux Paralympiques et mes trois médailles aux Championnats du monde m’a donné de la crédibilité pour pouvoir monter des projets et trouver plus facilement des partenaires.
Au cours de votre carrière, vous avez aussi remporté une médaille d’or (2010) et deux médailles d’argent (2009 et 2011) aux Championnats du monde. Cette régularité au plus haut niveau est-elle une fierté particulière ?
Je ne dirais pas « fierté ». En fait, c’est surtout une satisfaction personnelle. Je me dis : « tu vois, quand tu travailles un peu, ça marche ! ». Mais ce n’est pas une fierté : ça reste du sport et j’essaie de mettre ça à sa place !
Vous avez commencé le handisport suite à la déclaration d’une sclérose en plaques. Pourquoi avoir choisi l’aviron alors que vous pratiquiez auparavant le pentathlon moderne en valide ?
Le pentathlon moderne n’existe pas en handisport. Je m’étais déjà intéressée à l’aviron quand j’étais à la fac, mais je ne pouvais alors pas pratiquer pour différentes raisons. Quand j’ai dû passer en handisport, les médecins m’ont d’abord interdit de faire du sport. Mais ça me manquait trop. J’ai d’abord commencé par le basket pendant quelques années. Je trouvais ça très sympa mais l’aviron m’attirait toujours. J’ai alors appelé plusieurs clubs à côté de chez moi mais ils n’avaient pas de section handisport, car cela demande du matériel spécifique. Ce qui me plaît dans ce sport, c’est qu’il s’agit d’un sport d’extérieur et qu’il y a un contact avec l’eau et un côté glisse. J’aime aussi les sports à la fois technique et physique. Même quand on est fatigué physiquement, on peut toujours travailler le geste technique et c’est appréciable de pouvoir jouer sur les deux tableaux. J’ai tout de suite trouvé mon compte dans l’aviron !
Le handisport attire encore peu les sponsors. Comment faites-vous pour financer votre saison et notamment vos déplacements pour les compétitions ?
A l’aviron, on a la chance d’être géré pour le moment par la Fédération d’Aviron qui nous prend en charge pour tous les stages et les compétitions internationales. Pour tout ce qui est local, c’est en général le club qui finance. On est donc très bien soutenus. J’ai aussi eu une subvention du Ministère après ma première médaille aux Championnats du monde. Des partenaires ont également proposé de m’aider. J’ai eu la chance d’être aidée par des sponsors qui n’attendaient pas forcément de retombées médiatiques : Geodis, la Fondation Française des Jeux et AG2R La Mondiale me soutenaient et n’attendaient rien en retour. C’est ce qui m’a permis de terminer mes saisons sereinement.
Désormais, quels sont vos prochains objectifs et projets sportifs ?
Le 15 juin, je vais commencer un Paris-Marseille à la rame. Je vais passer par les canaux et les fleuves. Ce sera un gros challenge pour moi car je ne sais pas du tout ce que ça va être de ramer tous les jours et de traverser la France. Je voulais faire un défi de proximité où je partage des choses. C’est ce qui est en train de se passer donc je suis ravie.
Pour la suite, je ne sais pas du tout si je vais continuer l’aviron en compétition. J’ai envie de goûter un peu à tout. La sclérose peut évoluer et j’ai très envie d’essayer pleins de choses « au cas-où ». S’il m’arrive quelque chose un jour et que je dois arrêter le sport définitivement, je ne veux pas me dire : « mince, j’aurais bien aimé essayer ça et ça ». Je vais donc peut-être tester d’autres choses, mais je vais d’abord m’attacher à faire mon projet.
Merci Nathalie et bonne chance pour ce Paris-Marseille Ă la rame !
La carrière de Nathalie Benoît en quelques lignes :
Nathalie Benoît pratique l’aviron handisport depuis 2008, sport qu’elle choisit alors qu’elle est atteinte d’une sclérose en plaques. Elle évolue dans la catégorie skiff bras et épaules. Elle participe à ses premiers Championnats du monde en 2009 à Poznan (Pologne). Elle y prend la médaille d’argent.
En 2010, elle devient championne du monde à Karapiro (Nouvelle-Zélande). Un an plus tard, elle confirme au plus haut niveau en devenant une nouvelle fois vice-championne du monde à Bled (Slovénie).
Lors des Jeux Paralympiques de Londres en septembre 2012, elle remporte la médaille d’argent. Bientôt âgée de 33 ans, Nathalie Benoît s’est lancé dans le défi de rallier en juin Paris à Marseille en aviron.
Pour en savoir plus sur Nathalie, visitez son site officiel : www.nathalie-benoit.com
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