Avec cinq mĂ©dailles dont trois en or, Benjamin Daviet s’est particulièrement illustrĂ© lors des Jeux Paralympiques de Pyeongchang 2018. Le spĂ©cialiste du biathlon et du ski de fond y Ă©tait Ă©galement porte-drapeau de la dĂ©lĂ©gation française pour la cĂ©rĂ©monie de clĂ´ture. Entretien.
Benjamin, un petit mot d’abord sur la saison qui vient de se terminer. On imagine que tu es frustré de l’annulation des Championnats du monde à cause du coronavirus ?
Cette saison s’achève avec beaucoup de frustration. Je ne visais que les Championnats du monde et ils ont été annulés la veille. C’était forcément très frustrant. C’était une saison un peu compliquée aussi parce qu’il n’y avait pas beaucoup de neige. En janvier, on a fait le déplacement pour une épreuve du Coupe du monde mais elle a été annulée pour manque de neige. On n’a couru qu’en décembre et en février. On a donc fait très peu de courses. C’était une saison très bizarre !
Tu as participé aux Jeux Paralympiques de Sotchi en 2014, remportant la médaille de bronze du relais en ski de fond. Quels souvenirs gardes-tu de ces premiers Jeux Paralympiques ?
Les premiers Jeux sont forcément toujours quelque chose d’immense, d’incroyable et de merveilleux. Avoir gagné la médaille sur le relais, avec Thomas Clarion et Julien Bourla, a été aussi le déclenchement de ma carrière. Cela restera toujours de très beaux souvenirs !
Tu as brillé lors des Jeux Paralympiques de Pyeongchang 2018 avec deux médailles d’or et une d’argent en biathlon ainsi qu’une médaille d’or et une d’argent en ski de fond. Parmi toutes ces médailles, quelle est celle qui t’a le plus marqué ?
Toutes ! (rires) Le relais se concoure par équipe et tu le partages avec tes coéquipiers d’entraînement et tout le staff, donc ça soude encore plus l’équipe. En individuel, la médaille d’argent sur le 20 km en ski de fond a été très dure parce que j’étais malade et il a vraiment fallu se déployer pour aller chercher cette médaille. Il y a aussi le titre en biathlon moyenne distance, que j’ai gagné avec seulement 6 secondes d’avance. J’étais ex-aequo avec le deuxième jusqu’au dernier kilomètre. C’était une course très serrée, tendue du début à la fin. Et puis j’ai remporté une première médaille d’or le premier jour, sur ma première course. C’était un grand soulagement. Je me disais alors que la médaille d’or était faite et que les courses restantes ne seraient que du plus !
« J’ai eu la chance d’être porte-drapeau pour la cérémonie de clôture »
Tu as participé à de nombreuses courses lors de ces Jeux Paralympiques de Pyeongchang et tu as été régulier sur le podium. Cela a-t-il été difficile d’enchaîner toutes les courses pendant ces Jeux et de se remotiver pour la course suivante quelques jours après un titre ?
On a l’habitude d’enchaîner les courses. Ça se passe comme ça aussi en Coupe du monde. Il faut savoir bien gérer la récupération et se reposer. C’est aussi pour ça qu’on avait pris la décision que je ne participe pas au KO sprint classique. Il y avait le relais derrière et on a tout misé dessus. J’ai pu avoir un peu plus de repos. Sinon, ça aurait été compliqué sur le relais.
De façon plus générale, quels souvenirs gardes-tu de ces Jeux Paralympiques de Pyeongchang ?
J’ai participé à la cérémonie d’ouverture et j’ai eu la chance d’être porte-drapeau pour la cérémonie de clôture. Mais malheureusement, je n’ai pas pu aller voir d’autres épreuves parce qu’elles se déroulaient un peu loin du Village Olympique. Alors qu’à Sotchi, on avait pu assister à une course de ski alpin et où on était allé voir la demi-finale de hockey sur glace.
Tu es devenu handicapé suite à un accident de mobylette à 17 ans et un staphylocoque doré attrapé durant l’opération, qui t’as rendu le genou gauche bloqué. Pratiquais-tu déjà le ski de fond ou le biathlon avant ton accident ?
Non, je n’avais jamais pratiqué de biathlon auparavant. J’avais juste fait du ski de fond en club de 11 à 14 ans. Pourquoi je me suis lancé dans le ski de fond ? Ça m’a pris un peu du jour au lendemain ! J’en avais marre de ne plus faire de sport. J’ai voulu réattaquer le sport pour moi, pour le plaisir. J’ai choisi le ski de fond et le biathlon parce que j’ai besoin de faire du sport où il y a du dépassement de soi et où il faut rechercher dans le mental. Aussi, j’habite à 50 m des pistes de ski de fond, donc c’est pratique ! Petit à petit, c’est devenu plus en mode compétition.
Quels sont tes relations avec l’équipe de France de biathlon valide ? Vous croisez-vous souvent ?
Ça nous arrive de se croiser, par exemple quand on est en stage à Prémanon. J’ai la chance aussi de faire partie de l’armée de Champions et j’y côtoie beaucoup de valides. On fait un stage commando tous les ans et des journées à droite à gauche. Je les croise donc un peu plus. Sinon, on ne se croise par régulièrement, mais de temps en temps.
« On n’a pas de primes en Coupe du monde, contrairement aux valides »
Tu concoures à la fois en biathlon et en ski de fond. Est-ce courant aussi pour tes adversaires ? Est-ce difficile de gérer l’entraînement pour être au meilleur niveau sur les deux disciplines ?
Beaucoup d’athlètes pratiquent les deux. Il y a juste un de mes adversaires, un Norvégien, qui ne fait que les biathlons. Gérer les deux n’est pas simple. Il faut être bon en tir et bon en skis. Le fond et le biathlon ne sont pas vraiment les mêmes efforts. Cela demande plus de rigueur à l’entraînement pour être performant sur les deux. Je reste quand même meilleur en biathlon qu’en ski de fond. Mais certaines distances en ski de fond me plaisent énormément et j’arrive à y tirer mon épingle du jeu. C’est aussi pour ça que je pratique les deux !
Le handisport attire encore peu les sponsors. Comment fais-tu pour financer ta saison et notamment tes déplacements pour les compétitions ?
On donne une cotisation tous les ans à la Fédération. Cela finance des stages et des Coupes du monde. J’ai quelques sponsors qui font que mes saisons ne me coûtent pour le moment pas grand-chose. J’ai surtout la chance d’avoir un contrat avec l’Armée et de recevoir un salaire tous les mois. Sinon, ce serait compliqué car on n’a pas de primes en Coupe du monde, contrairement aux valides.
Pour finir, quels sont tes objectifs à court et à moyen terme ? Penses-tu déjà aux Jeux Paralympiques de Pékin 2022 ?
L’année prochaine, il y aura les Championnats du monde de ski de fond et de biathlon à Lillehammer. L’objectif sera d’aller y chercher des titres. Après, l’objectif sera peut-être le globe sur la saison. Mais je ne le vise pas clairement. Cela se fera au fur et à mesure de la saison.
Les Jeux sont forcément toujours dans un coin de la tête. On s’entraîne aussi pour ça. L’objectif sera clairement d’aller chercher la médaille d’or à Pékin. La route est encore longue et il faut mettre toutes les chances de son côté !
Merci beaucoup Benjamin pour ta gentillesse et ta disponibilité !
La carrière de Benjamin Daviet en quelques lignes :
Benjamin Daviet perd l’usage de son genou Ă l’âge de 17 ans, ayant attrapĂ© un staphylocoque dorĂ© lors d’une opĂ©ration suite Ă un accident de mobylette. Il participe aux Jeux Paralympiques de Sotchi 2014 et remporte la mĂ©daille de bronze du relais 4×2,5 km en ski de fond.
Aux Championnats du monde 2015, il remporte 3 médailles en ski de fond (or en relais, argent sur 20 km et sur 1 km) et 2 médailles en biathlon (argent sur 7,5 km et bronze sur 15 km). Aux Championnats du monde 2017, il devient double champion du monde en ski de fond (relais et 10 km) et champion du monde en biathlon (15 km). En biathlon, il obtient aussi l’argent sur 12,5 km et le bronze sur 7,5 km.
Il brille lors des Jeux Paralympiques de Pyeongchang 2018, remportant 5 mĂ©dailles : l’or sur 7,5 km et 12,5 km ainsi que l’argent sur 15 km en biathlon, et l’or en relais 4×2,5 km relais ainsi que l’argent sur le 20 km en ski de fond. Aujourd’hui âgĂ© de 30 ans, Benjamin Daviet vise dĂ©sormais les Jeux Olympiques de PĂ©kin 2022.
Participations aux Jeux Paralympiques de Sotchi 2014 et Pyeongchang 2018
MĂ©daillĂ© d’or aux Jeux Paralympiques de Pyeongchang 2018 (relais 4×2,5 km ski de fond, 7,5 km biathlon et 12,5 km biathlon)
Médaillé d’argent aux Jeux Paralympiques de Pyeongchang 2018 (20 km ski de fond et 15 km biathlon)
MĂ©daillĂ© de bronze aux Jeux Paralympiques de Sotchi 2014 (relais 4×2,5 km ski de fond)
Grand champion qui mĂ©riterait d’ĂŞtre plus connu !