Henri Sannier a Ă©tĂ© le prĂ©sentateur de l’Ă©mission « Tout le sport » pendant vingt ans. Aujourd’hui retraitĂ©, il garde un lien avec le sport grĂące Ă l’Ă©criture de livres, dont rĂ©cemment « Les Seigneurs du football ». Entretien.
Henri, vous avez Ă©crit les livres « Les Seigneurs de la route » et « Les Seigneurs du football ». Pouvez-vous nous raconter comment vous avez eu lâidĂ©e dâĂ©crire ces livres ?
Les Editions Gallimard – HoĂ«beke mâont appelĂ© et mâont dit : « On sait que vous aimez le vĂ©lo, est-ce-que cela vous dirait dâĂ©crire un livre avec quarante portraits de champions cyclistes qui vont ont marquĂ© ? ». Comme ça a marchĂ© et quâils savent que jâaime aussi le football, ils mâont ensuite demandĂ© quarante portraits de footeux qui ont marquĂ© ma mĂ©moire.
Je me suis lancĂ© dans lâaventure. Ce nâĂ©tait pas Ă©vident dâen choisir quarante. On a toujours quarante-cinq ou cinquante noms et il faut donc en Ă©liminer. Jâai essayĂ© de choisir ceux qui ont bercĂ© mon enfance et ceux qui ont bercĂ© ma carriĂšre journalistique. Ce nâĂ©tait pas un exercice facile !
Dans le livre « Les Seigneurs du football », vous faites le portrait de 40 géants du ballon rond. Parmi ces joueurs, quel est celui qui vous a le plus marqué ?
Câest Raymond Kopa qui mâa le plus marquĂ©. Il symbolise le football des annĂ©es 1950. CâĂ©tait le fils dâun Ă©migrĂ© polonais. Il a grandi dans le bassin minier et il a dĂ©butĂ© dans une petite Ă©quipe, Ă NĆux-les-Mines. AprĂšs, ça a Ă©tĂ© la grande aventure qui dĂ©bute Ă Angers et sâest poursuite Ă Reims, oĂč il remporte quatre titres de champion de France, et au Real Madrid, oĂč il gagne trois Coupes dâEurope. Et il y a eu la consĂ©cration lors de la Coupe du monde 1958 en SuĂšde, oĂč il forme avec Fontaine, Piantoni et Vincent la meilleure attaque de la compĂ©tition. Les Français terminent troisiĂšme, aprĂšs avoir Ă©tĂ© battus en demi-finale par le BrĂ©sil de PelĂ©. Cette annĂ©e-lĂ , Raymond Kopa est dĂ©signĂ© meilleur joueur de la Coupe du monde et remporte le Ballon dâOr europĂ©en devant une autre star, Di StĂ©fano. Pour moi, câĂ©tait le champion des champions.
« CâĂ©tait trĂšs Ă©mouvant de revoir cette derniĂšre avec tous les collaborateurs qui avaient Ă©tĂ© autour de moi »
Mis Ă part lâĂ©criture de ces deux livres, quelles ont Ă©tĂ© vos activitĂ©s depuis votre dĂ©part Ă la retraite en 2017 ?
Depuis mon dĂ©part Ă la retraite, jâessaie de me reposer un petit peu mais jâai tout de mĂȘme une vie trĂ©pidante. Je suis maire de mon village et jâai Ă©tĂ© réélu pour la huitiĂšme fois. Câest beaucoup de travail, car les maires des petits villages sont trĂšs sollicitĂ©s. JâĂ©cris aussi. Je pense que câest important dâĂ©crire. Je fais du sport : du vĂ©lo, du ski, de la natation. Je me balade Ă©galement. Et jâai des petits enfants depuis quelques temps : une petite fille qui a 15 mois et un petit garçon qui a 7 mois. Quand ils sont lĂ , je peux vous dire que cela occupe les journĂ©es !
Vous avez commencĂ© sur France TĂ©lĂ©visions en prĂ©sentant notamment des journaux tĂ©lĂ©visĂ©s. Pouvez-vous nous raconter comment vous en ĂȘtes venu Ă basculer sur le sport ?
Jâai dâabord fait des journaux tĂ©lĂ©visĂ©s en station rĂ©gionale. Je suis ensuite venu Ă Paris et jâai créé le 19/20 sur la 3. AprĂšs, je suis allĂ© sur la 2 pour prĂ©senter le Journal de 20 heures, en alternance avec Bruno Masure. Jâai aussi prĂ©sentĂ© le 13h et le 23h. Je suis revenu sur la 3, chaĂźne pour laquelle jâai Ă©tĂ© le patron et jâai fait le Soir 3. Ce nâest quâaprĂšs que jâai prĂ©sentĂ© « Tout le sport ». Jâai Ă©galement commentĂ© le Tour de France et des Ă©missions dâavant Tour de France et dâavant Coupe du monde. Jâai couvert la Coupe du monde 1994 aux Etats-Unis ainsi que la Coupe du monde 1998.
Vous avez été le présentateur de « Tout le sport » entre 1997 et 2017. Quelle a été pour vous la clé pour durer aussi longtemps ?
La clĂ©, câest quâon est proches de nos tĂ©lĂ©spectateurs et quâon parle de toutes les disciplines, comme le nom « Tout le sport » lâindique. Ce nâest pas « Tout le foot », ni « Tout le cyclisme ». Les moindres disciplines passent dans « Tout le Sport », comme le jeu de flĂ©chettes et le canyoning. Câest important car chacun se reconnaĂźt dans les petites disciplines quâil pratique. Les gens sont trĂšs flattĂ©s quâon parle de leur sport. Mais on parle bien sĂ»r aussi des grandes disciplines comme le foot car cela passionne nos tĂ©lĂ©spectateurs.
Vous avez présenté votre dernier « Tout le sport » en 2017, aprÚs 20 ans à la présentation. Racontez-nous comment vous avez vécu cette derniÚre journée ?
Il y avait beaucoup dâĂ©motions mais jâavais dit Ă tout le monde que mĂȘme si câĂ©tait mon dernier, câĂ©tait un journal comme les autres et quâil nây avait pas Ă couler de larmes. CâĂ©tait un moment dâeuphorie et de joie pour moi. Je vous le dis franchement, jâavais quand mĂȘme pris un ou deux calmants ! Je lâai prĂ©sentĂ© avec toute lâĂ©quipe autour de moi et câĂ©tait sublime. Jâai regardĂ© cette derniĂšre Ă©mission rĂ©cemment sur Internet. Je ne lâavais pas encore revue car je nâaime pas trop regarder en arriĂšre. CâĂ©tait trĂšs Ă©mouvant de revoir cette derniĂšre avec tous les collaborateurs qui avaient Ă©tĂ© autour de moi. Ils mâappellent encore aujourdâhui pour me demander un conseil et pour savoir si jâai vu telle ou telle chose. Je leur envoie aussi parfois des messages pour leur dire que jâai bien aimĂ© telle ou telle Ă©mission. Je continue Ă ĂȘtre tĂ©lĂ©spectateur et jâaime ce quâils font !
« Jâaurais aimĂ© recevoir Zlatan Ibrahimovic car je suis fascinĂ© par le personnage »
Vous avez présenté les Tours de France 2005 et 2006. Pour un passionné de cyclisme comme vous, on imagine que cela a été un grand moment ?
CâĂ©tait un grand moment, dâautant plus que je les ai commentĂ©s avec Laurent Jalabert et avec Laurent Fignon, qui sont pour moi dignes dâintĂ©rĂȘt. CâĂ©tait une expĂ©rience trĂšs intĂ©ressante. Ce nâĂ©tait pas facile, car il faut trouver les mots quand on est cinq heures Ă lâantenne. Mais on prĂ©sente aussi de beaux chĂąteaux, de belles abbayes et de beaux cours dâeau. Il y avait Jean-Paul Ollivier avec nous.
Je garde un trĂšs bon souvenir de la saga Tour de France. En tout, jâai couvert quinze Tours de France : deux aux commentaires et treize Ă la prĂ©sentation des Ă©missions dâavant Tour et dâaprĂšs Tour. Cela mâa permis de cĂŽtoyer beaucoup de coureurs, dâanciens champions comme Raymond Poulidor et Bernard ThĂ©venet, ainsi que des afficionados du Tour, comme des artistes ou des politiques. Arnold Schwarzenegger Ă©tait notamment venu dans une Ă©mission.
Jâai vĂ©cu tous les grands Tours dâArmstrong. Jâai des anecdotes sympathiques avec lui. Il me faisait parfois des clins dâĆil. Il me demandait aussi de faire passer des messages, comme sur le port du casque : pour lui, le port du casque Ă©tait bien sauf dans la derniĂšre ascension des Ă©tapes de montagne. Il me demandait de le dire dans mes commentaires. Il y avait Ă ce moment-lĂ une complicitĂ© avec les coureurs !
Pouvez-vous nous raconter votre meilleur souvenir lors de la présentation de « Tout le sport » ?
Jâai pleins de meilleurs souvenirs. Jâavais par exemple invitĂ© Michel Platini sur le plateau de « TLS » Ă la veille de la Coupe du monde 1998. Il Ă©tait lâun des animateurs de la compĂ©tition. Je lui ai posĂ© toutes mes questions. Il y avait la rĂ©plique de la Coupe du monde sur le plateau et Ă un moment donnĂ©, je lui ai dit : « On va toucher la Coupe du monde, elle nâest pas loin et on va peut-ĂȘtre la gagner ! ». Mais il a refusĂ© de la toucher. Il a expliquĂ© quâil ne voulait pas de geste prĂ©monitoire et que cela pourrait nous porter malheur !
Jâai des souvenirs aussi sur le plateau avec Tony Parker, Rudy Gobert, Nikola Karabatic, David Trezeguet, ainsi quâavec tous les vainqueurs du Dakar ensemble. Je nâai pas eu beaucoup de footballeurs car ils se dĂ©placent peu. Jâaurais aimĂ© recevoir Zlatan Ibrahimovic car je suis fascinĂ© par le personnage.
AprĂšs « Les Seigneurs de la route » et « Les Seigneurs du football », avez-vous en tĂȘte dâautres idĂ©es de livres Ă Ă©crire ?
Si les Editions Gallimard – HoĂ«beke veulent continuer, cela serait du boulot pour moi mais je serais prĂȘt Ă le faire. JâĂ©crirais bien par exemple « les Seigneurs de lâathlĂ©tisme » car jâai toujours Ă©tĂ© fascinĂ© par ce sport. On peut aussi faire les « Seigneurs du rugby ». Si cela marche, on peut en faire une collection ! Je suis trĂšs flattĂ© car cela pĂ©rennise mon image de journaliste sportif. Je fais beaucoup de dĂ©dicaces. A chaque fois, beaucoup de monde vient et parler avec les gens me remĂ©more mes annĂ©es de tĂ©lĂ©. Cela me fait du bien, câest un ballon dâoxygĂšne !
Merci beaucoup Henri et bonne continuation !
CrĂ©dits photo 1 : SteÌphane Cardinal e Corbis Getty Images
La carriĂšre dâHenri Sannier en quelques lignes :
Henri Sannier débute sa carriÚre en tant que journaliste sur France 3 Normandie. Il crée et présente le 19/20 (France 3, de 1986 à 1987). Il présente ensuite le Journal de 20 heures (Antenne 2, de 1987 à 1988 puis de 1990 à 1992), le Journal de 13 heures (Antenne 2, de 1992 à 1994), et le Soir 3 (France 3, de 1994 à 1997).
A partir de 1997, il est le rĂ©dacteur en chef et le prĂ©sentateur de lâĂ©mission « Tout le sport » sur France 3. En 2006 et 2007, il prĂ©sente le Tour de France. Il est ensuite en charge dâĂ©missions dâavant Tour et dâaprĂšs Tour. En septembre 2017, aprĂšs 20 ans Ă la tĂȘte de lâĂ©mission, il prĂ©sente son dernier « Tout le sport » et prend sa retraite.
En 2020 et en 2021, il publie les livres « Les Seigneurs de la route » et « Les Seigneurs du football » (Editions Gallimard – HoĂ«beke). Il est maire dâEaucourt-sur-Somme, poste quâil occupe depuis 1977.
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